[AB2] (-242) - Et Brennos tint parole...

Feux de Bel - printemps -242 - Camulodunum - Terres des Cenomanii - Italie :

Ils étaient tous là ! Cunomar, Rix des puissants Sénons, maître de Ravenna et de Volaterrae, Cumborix à la fière moustache en croc ourlée de gris, Rix des Insubres, Viridomaros le Cenoman, fier d'accueillir ses alliés.
Les prestigieux chefs des celtes d'Italie étaient bien au premier rang.
Derrière eux la masse colorée et tumultueuse des chefs de clans et des envoyés des Ligures et de Castelbaranis, rix des Taurinii.
A leurs côtés, invité et, par faveur spéciale du grand druide, autorisé à pénétrer dans le sanctuaire, Hannon le sage. Représentant de Carthage.

Plusieurs prétresses s'avançèrent, venant par le sentier empierré qui montait depuis la plaine vers le sanctuaire.

"Brennos, fils de Lug et champion d'Esus ! Que Taranis éclaire ton chemin ! Que tes chaînes soient ta fierté et le salut de ton peuple !" psalmodièrent elles.

Cunomar se tourna vers Cumborix. "Casticcolos, ton glorieux fils mena son plus beau combat ici. Dans la plaine qui est à nos pieds. Brennos le prit et le chargea de chaines. Ce fut son triomphe. Et, les Dieux ont voulus qu'il se livre à notre allié de Carthage ici même.
Hannon et Amilcar n'ont pas oubliés le sacrifice de celui qui fut ton héritier mais aussi mon ami. Et nos Dieux en seront content ! Le grand Brennos, chargée de chaines. Ce fut un terrible adversaire. Le plus terrible que nous ayons jamais affronté. Honorons le pour son sacrifice..."
Le Rix des Senons s'arrêta avant la fin de sa phrase. Un murmure d'étonnement se répandait dans l'assemblée.
Le char, tiré par 4 boeufs immaculés et qui finissaient de grimper la pente portait un corps chargé de chaines.
Dans son armure de bataille, paré de ses plus beaux bijoux, comme figé par la volonté divine, se tenait Brennos.
Du moins son enveloppe charnelle. Chargée de chaines d'or, d'argent et d'electrum...

"Le puissant Brennos, Keltorix, défenseur de son peuple ! Il se livre à vous ! Comme il l'à juré ! Chargé de chaines !
Les Dieux l'ont abandonné dans sa guerre. Il s'est offert à eux ! Grand fut son sacrifice à Esudunum ! Honorez le dans la mort comme vous l'avez craint dans la guerre".

Ainsi parlait, Vindex, le jeune druide, venu d'Esudunum, mener le Keltorix à ses vainqueurs...

Tandis que l'assemblée contemplait la dépouille de celui qui fit trembler le monde, Vindex eut, une nouvelle fois, la vision du suicide rituel du Keltorix. C'était il y à plusieurs lunes. Dans le Nemeton d'Esudunum....

Le sanctuaire encore nimbé par les brumes nocturnes dominait lac profond et mystérieux alimenté par la tumultueuse chute d'eau jamais asséchée.
L'aube allait poindre. L'horizon s'irisait déja d'une lueur rouge diffuse.

En contrebas se dressait Esudunum ! La cité d'Esus !

Aggrandit par le labeur de milliers d'esclaves depuis des années, le Nemeton était bien le plus vaste jamais dédiés aux Dieux Celtes.

Après avoir pénétré dans ce vaste rectangle de plus de 10 stades sur 5 par l'immense portique à plusieurs arches, le cortège royal s'avançait au sein même du sol sacré délimité par un fossé et une imposante palissade en bois renforcée de blocs de pierres cyclopéens.
Ainsi était séparé le monde des profanes de celui des Dieux.
La palissade, tout comme la plupart des bâtiments du Nemeton était ornée de crânes d'animaux sacrifiés aux Dieux mais aussi de prisonniers et esclaves honorés de devoir offrir leur vie aux mêmes divinités !

Le Keltorix, Brennos, chevauchait son plus bel étalon. Son armure d'or rayonnait comme si Lug lui même l'honorait. Derrière lui le prince Luern franchît le portique et, accompagné par le druide portier, pénétra dans l'enceinte du Nemed. Le Grand Druide attendait Brennos et son fils.
Les Ambacts et tous les chefs de clans du Keltobrogos mais aussi des peuples Cymri, s'arrêtèrent devant le portique. Innombrables. Silencieux.

L'aire sacrée, Lien entre les Dieux et les Hommes, s'étendait au centre du Nemeton.
C'était un monumental espace circulaire de plus de 2 stades, délimité par 9 fosses cylindriques aux parois boisées qui entourait une excavation centrale ovale. L'Autel proprement dit.

Luern s'arrêta devant le cercle et tira son épée.
Le Grand Druide, prit la bride du cheval de Brennos et le fit avancer. Il s'arrêta devant le creux qui menait sous la terre, siège des divinités terrestres.
Bennos leva la tête pour honorer également celles des cieux. Longuement.

Puis le Keltorix sauta à terre.
Il déposa bijoux, armes et armure en offrande, puis dressé, il leva les bras.
"Dieux ! J'ai faillit ! Ma guerre ne fut pas la votre ! J'ai pourtant vaincu l'ennemi dans d'innombrables batailles et sacrifié prisonniers et butins en offrande.
En ce jour, je sauve mon peuple et vous offre ma vie en expiation ! Mes ennemis auront mon corps, chargé de chaines. Telle était ma parole. Mais ma vie est votre."

Le Keltorix se tourna alors vers Luern. "Puisse mon fils être digne de son peuple et de nos Dieux !" tonna t il.

Le grand druide s'agenouilla, se saisit du fourreau de la lourde épée de Brennos (celle là même qui avait faillit décapité le Prince numide Gaia à la bataille de la Sapis) et en sortit la lame.
Il cala la poignée de celle ci entre deux pierres sacrées et la maintint fermement, inclinée vers le Septentrion, diagonale d'acier sur laquelle vint se refléter soudainement le soleil levant.
"Il est temps mon Roi. Les Dieux t'acceptent et honorent ton sacrifice".

Brennos contempla le sanctuaire une dernière fois. Les nombreux Tana (petits temples) dédiés aux multiples divinités mineures et les grandes fosses ou de vastes bâtiments, lieux d'offrandes aux divinités majeures.
Il devina les amoncellements des milliers d'armes et d'armures, de non moins nombreux bijoux et vases précieux, des centaines de chars et des richesses innombrables qui s'y trouvaient. Fruit des tributs ou pillage levés sur les peuples vaincus par le Keltorix !
Son regard s'arrêta un instant sur le sanctuaire d'Esus, le plus vaste de tous, dont la fosse était emplie des ossements des sacrifiés.
Puis, tandis que ses yeux revenaient vers le Grand Druide et Luern il discerna encore, de loin en loin, les fosses rituelles d'hommage aux guerriers tombés au combat.

Esudunum ! Gloire de Keltobrogos ! Centre de la Celtique !

Le regard du Keltorix se dirigea vers le portail d'entrée, formant ainsi un axe le reliant orienté sur celui du Solstice d'été.

"Je suis Brennos fils d'Epanactos, chef des Volsques du Danube et Keltorix. Je viens à vous car tel est mon choix. Car telle est notre loi".
Le vieux guerrier se pencha en avant et, lentement, empala son corps sur la lame de son épée. Nul spasme, nul soubressaut n'indiqua le moment où il avait rejoint les Dieux.

Le Grand Druide, délaissant l'épée maintenant sacrée, se releva. Dans un geste lent il abaissa ses bras vers le sol. Puis les leva vers le ciel.
Le soleil était maintenant haut.

"Brennos ! Brennos ! Keltorix ! Keltorix !". Scandé par les chefs qui martelaient leurs lourds boucliers de leurs épées, le péan résonna dans les montagnes d'Ostobrogos....