-244 - Eté - Bataille d'Acharnas - L'Hydaspe sur la Céphise
Eté -244 - Grèce :
Au début de l’été –244, après la chute de Thèbes, Alexandros entre en Attique à la tête d’une troupe considérable, près de 60000... Une foule de marchands, stocks de vivres, troupeaux, rassemblés à grands frais tout l’hiver dans le sud de la Locride accompagne l’armée en marche.
Le roi a renvoyé au nord Eumène Ier déloger Chrémonidès de Pella le privant d’une partie de ses forces mais les rapports de ses espions lui avaient assuré que l’ennemi serait dispersé : les spartiates défendraient le Péloponnèse, Chrémonidès garderait Pella, les Séleucides voguaient vers l’Epire... Il avançait donc d’un pas décidé vers Nicias, seul obstacle entre lui et Athènes.
Après plusieurs jours de marche sous un soleil de plomb, les reconnaissances lui montrèrent combien son réseau d’informateurs était perfectible...
Aucune des informations annoncées n’étaient bonnes, bien au contraire... Les spartiates avaient rejoint Nicias, Chrémonidès avait accosté la veille au Pirée et, pire des catastrophes, des voiles séleucides avaient été vues entre l’Eubée et l’Attique : des flancs des nefs ventrues, deux armées s’étaient déversées sur les plages au nord d’Athènes.
Les armées d’Antiochos étaient au rendez-vous et avec elles, les terribles éléphants vendus par le Très Haut, Très Glorieux et Très Puissant Ashoka, Empereur des Mauryens.
Immédiatement, des messagers sont envoyés pour rappeler Eumène et l’armée se déploie au nord de la rivière Céphise. Les coalisés se sont déployés sur la rive sud, empêchant toute traversée.
Pendant une semaine, les guetteurs racontent voir passer les voiles séleucides, signe que Poséidon a ralenti leur traversée et que l’ennemi n’est pas encore assemblé.
Ses stratèges, Cratèros surtout qui veut racheter sa faute de l’année passée, poussent le roi à attaquer mais le jeune souverain ne bougera pas sans Eumène. Enfin l’armée de Pergame arrive.
Les deux jeunes rois se retrouvent sous la tente de commandement, accompagné de leurs officiers. La soirée est douce, des bivouacs montent l’odeur de viande grillée des offrandes aux Dieux et les rires des soldats. Une réelle fraternité s’est développée entre ces hommes qui se battent ensemble depuis des années. Ils se connaissent. Ils se font confiance. Ils se soutiennent. Ce sentiment est particulièrement répandu dans la Phalange quand ils marchent en rangs serrés sur l’ennemi...
Eumène a bien pris connaissance de la disposition et des compositions des armées... Il prend la parole : « Alexandros, connais-tu les Mémoires, d’Aristobule de Cassandréia ?
- Ce nom me dit quelque chose, frère... Mais oui, bien sûr, mon précepteur m’en a rabattu les oreilles. N’est-ce pas lui qui inventa le combat singulier d'Alexandre et de Porus, le roi indien battu à l’Hydaspe ? Mon grand père Antigone le Borgne nous racontait même une anecdote cocasse à ce propos... Après la bataille de l’Hydaspe, Aristobule lut spécialement au roi ce morceau de son ouvrage, dans l'espoir qu'il lui concilierait surtout la faveur du prince. En raison des mensonges qu'il avait inventés pour rehausser la gloire d'Alexandre, et de l'exagération qu'il avait donnée à ses exploits réels, le roi prit le livre et le jeta dans l’Hydaspe, sur lequel ils se trouvaient naviguer, ajoutant : « Je devrais, Aristobule, t'y jeter aussi la tête la première, pour t'apprendre à me faire soutenir de pareils combats et tuer des éléphants d'un seul coup de javelot. » Eumène sourit.
- Oui, c’est bien lui. .. Vois-tu, nous conservons à la bibliothèque de Pergame un exemplaire magnifique de ces mémoires... Elles sont très précises également sur les récits des batailles... Notamment celles contre les troupes accompagnées d’éléphants » Le regard d’Eumène se portait alors de façon insistante sur le croquis représentant les troupes de part et d’autre de la Céphise... Le roi sourit... « Hydaspe... Bon présage... »
Le lendemain, dès le petit matin, l’ordre est donné de mettre l’armée en ordre de bataille. Avec Eumène, les troupes de la ligue de Samothrace comptent 67000 hommes dont 16700 cavaliers. La Ligue grecque aligne elle aussi une armée formidable plus de 56000 hommes et 200 éléphants de guerre. C’est le roi de Sparte Acrotatos en personne qui est à la tête des armées coalisées.
Mais Alexandre n’attaque pas... Il attend plusieurs jours durant lesquels il fait quelques mouvements de diversion le long de la rive et organise une campagne de désinformation, faisant passer, par les paysans locaux, l'information qu'il considère que l'eau est trop haute pour tenter un franchissement, ce qui arrive aux oreilles de Acrotatos.
Durant une nuit, alors que les coalisés ont une confiance excessive, Alexandre traverse en personne l'Hydaspe, quelque vingt-cinq kilomètres en amont, avec une troupe d'élite formée d’Hypaspistes et de Compagnons. Averti, Acrotatos, voyant toujours sur l'autre rive le corps de troupe principal, ne craint pas le danger. Acrotatos envoie seulement une petite troupe de cavaliers Séleucides commandée par l'un des tétrarque pour s'opposer à Alexandre. Il commet là une erreur car son bataillon est défait et son tétrarque tué.
Les chefs orientaux sont remontés contre Acrotatos pour ce qu'ils pensent être une erreur et un massacre inutile de leurs précieux cavaliers légers. Envoyés sans grande connaissance du terrain là où de solides hoplites grecs eussent étés mieux employés...
Lorsque la bataille débute réellement, la cavalerie d'Alexandre est à droite de la ligne de front, tandis que la phalange, commandée par Cratèros, a pour ordre de traverser le fleuve au cas où Acrotatos fait face à Alexandre avec toutes ses troupes.
L'armée coalisée est rangée avec la cavalerie sur les deux flancs, les éléphants de guerre en avant, et l'infanterie derrière les éléphants. Ces éléphants de guerre offrent une difficulté nouvelle. Alexandre doit en effet revoir sa stratégie habituelle qui consiste à couper les lignes adverses afin de lancer la cavalerie dans l'ouverture ; ce qui a été d'une efficacité redoutable aux batailles de Prevezza et de Thermo.
De plus, les éléphants rendent les chevaux macédoniens si nerveux qu'ils refusent de charger de front les pachydermes. Alexandre est donc forcé de modifier sa stratégie. Il envoie donc un groupe de cavaliers contourner les coalisés afin de les attaquer par l'arrière.
"Mon Roi avait ordonné que nos éléphants soient sur les flancs, face à la cavalerie et non au centre, Roi Acrotatos" tempête, dans l'autre camp le satrape Pythias, stratège des troupes impériales.
Alexandre débute la bataille par une charge de cavalerie sur le flanc gauche des coalisés. Acrotatos le renforce en y transférant une partie de sa cavalerie de son flanc droit ; ce qui permet à la cavalerie macédonienne envoyée pour contourner l'armée ennemie de la prendre par l'arrière, comme Alexandre l'a prévu.
La cavalerie coalisée est alors détruite, sans forcer la cavalerie macédonienne à approcher les éléphants. Pendant ce temps, les phalangistes macédoniens et l'infanterie de Pergame, qui ont traversé le fleuve, s'opposent à la charge des éléphants. Dans un ordre impeccable, les phalanges répètent la manœuvre d’effacement si bien décrite par Aristobule et reprise lors des manœuvres que masquait l’attente : juste avant l’impact, les rangs se serrent pour libérer le passage nécessaire à la charge de l’éléphant, qui, lancé ne peut s’arrêter... Les archers mercenaires, massés derrière les phalanges décochent leurs traits sur les cornacs dont un grand nombre sont tués...
Cette menace éliminée, les forces d'Alexandre entourent bientôt l'armée coalisée pour la curée... L’ennemi est proche de l’anéantissement et c’est au prix de combats titanesques que l’armée de la ligue grecque peut se sortir de la nasse.
Après la bataille les rois de la ligue de Samothrace se retrouvent dans les lambeaux du camp ennemi. Les hommes autour d’eux sont à la fête et se partage les biens des vaincus.
« Hydaspe hein ?... » commença Alexandros.
« La disposition s’y prêtait », reprit Eumène...
« Aratos, vous avez encore été héroïque ! Avec vous à sa tête, l’Etolie n’a rien à craindre sauf la colère des Dieux. »
« Merci. », répondit sobrement le grave Aratos.
Le roi s’approcha alors de Cratèros : « Tu t’es bien battu, vieux compagnon. J’ai surveillé ta manœuvre des phalanges et j’ai vu que tu avais mené en personne la charge contre le locchoï sacré thébain... Des lions ces thébains.... On m’a rapporté que pas un n’a survécu ?
« C’est exact votre majesté... » répondit Cratèros.
« C’est bien, ils ont agi avec honneur et leur âme doit être en route pour les champs élysées...
« Et nous, mon Roi, vers où allons-nous ? ».
Alexandos sourit... « A Athènes... »