-247 La Cour du Pont Euxin
LA COUR DU BASILEUS MITHRIDATE II
L’homme ceint du diadème avança avec majesté. Sa jeunesse resplendissait au sein de la cour des anciens favoris fardés et de guerriers aux traits couturés et aux yeux plissés de rides. Agé de dix huit ans, le menton rond et charnu, le front haut surmonté de courtes boucles retombant sur ses oreilles, Mithridate II roi du Pont et Evergète de Sinope, devenait en ce jour basileus.
La « vie inimitable », une vie de plaisir se proposait à lui…
Le basileus portait habituellement des vêtements simples contrastant avec le luxe de la Cour. Son manteau de laine, le peplos, court et sans manche, était agrafé sur l’épaule par une fibule. Le peplos avait été jeté avec grâce par-dessus la tunique de lin transparent. Une couture réunissait les bords du tissu plié en deux dans le sens de la hauteur. La ceinture à la taille permettait de raccourcir la longueur du chiton et de faire bouffer le tissu. Mais surtout, le bandeau de l’athlète vainqueur ornait son front. Le ruban de soie blanche brodée se terminait par un nœud et par deux bandelettes retombant sur les épaules vigoureuses du jeune homme. Le diadème indiquait à tous sa dignité de basileus, son autorité royale.
Pour la cérémonie officielle le roi se devait de revêtir son sobre costume militaire. Il apparaissait drapé dans la chlamyde, ce manteau militaire macédonien rappelant l’épopée d’Alexandre le grand. Le souverain chaussait des krépidès, des bottines. Le diadème, noué autour du chapeau en feutre macédonien, entourait ainsi la kausia.
La parure de la souveraine resplendissait à côté de la simplicité du costume officiel de son époux. Elle ne portait pas le bandeau ornemental mais une couronne de métal précieux. Un voile lui couvrait l’arrière de la tête. Les riches colliers, les boucles d’oreilles ainsi qu’un sceptre conféraient à l’épouse du roi, la fille du roi de Colchide, une splendeur inégalée au sein de la Cour royale.
Les courtisans rivalisaient d’obséquiosité, voulaient plaire, minaudaient et battaient des cils devant leurs nouveaux souverains. Le favori Agathoclès pouffait intérieurement. Les courtisans pouvaient être vils et intelligents, jamais ils ne le seraient autant que lui…
Les regards en biais, haineux ou suppliants, méprisant le plus souvent, soulignait la hiérarchie et les rivalités de la Cour. Les premiers courtisans à venir rendre hommage au diadoque furent ses proches, nommés syngénéis (note : « parents »), suivis par les gardes du corps en chef, les archimatophylaques. Vinrent après eux les groupes des philoi : prôtoi philoi (« premiers amis »), philoi (« amis ») et enfin les diadochoi (« successeurs »). Au sein de cette influente aristocratie le souverain devait choisir ses ministres.
« Sosibios » prononça le roi avec un sourire en l’appelant auprès de lui.
Agathoclès regarda le nouveau favori du roi, les yeux brûlant d’une rage haineuse.